Mathilde Le Coz est Directrice des Ressources Humaines de Mazars (cabinet d’audit, d’expertise comptable, de fiscalité et de conseil aux entreprises) et Présidente du Lab RH, association qui promeut l’innovation RH.
Elle revient dans cet interview sur son parcours et le futur des RH 🌟.
L’innovation RH, c’est être au service dans le sens noble du terme
Son premier job en sortie d’école, c’est dans l’audit financier. Mais surtout, c’est un coup de cœur. “Je me voyais chez Mazars”, confie-t-elle, et quelques années plus tard on lui propose un poste dans les ressources humaines. La passion RH est lancée.
À l’époque, la voie est libre pour créer une véritable innovation RH : “J’ai travaillé principalement autour de la culture entrepreneuriale interne, donc comment on libère les initiatives, comment on se repose sur les collectifs de collaborateurs pour transformer l’organisation.” Mathilde s’est imposée par sa vision non pyramidale et sa pratique du terrain. Pas question de se positionner en amont des équipes mais bien avec elles.
“La fonction RH fait sens et contribue à un mieux être ensemble dans l’entreprise et dans la société”.
Pour Mathilde, le RH est une noble façon d’être au service des clients ou de l’entreprise de façon transversale, et non seulement comme simple support.
La Tech RH, pour engager dans l’humain plus que dans les capacités
Le mot startup implique le côté “tech”, mais ce que Mathilde entend c’est le lien avec les outils tech qui permettent de nouveaux usages RH pour mieux accompagner. Par exemple, dans le cadre de recrutements pour venir en aide à l’équipe humaine de sélection car
“non, dit-elle, les robots et autres AI ne pourront pas remplacer un contact humain.” La Tech RH n’est qu’un support pour déployer des concepts et des qualités qui doivent relier les collaborateurs, pas les annihiler.
D’ailleurs, cette dimension humaine est particulièrement présente chez Mazars dont le motto est « venez pour booster votre employabilité ».
L’entreprise défend l’idée d’être là à un moment particulier non seulement de la carrière, mais surtout de la vie, des employés. “Il s’agit de valoriser l’humain plus que le CV.
Même si le filtrage, c’est très compliqué. Surtout quand on s’est engagé à répondre aux 50 000 candidatures que Mazars reçoit par an !”
Vers une professionnalisation des soft skills ?
Les soft skills, innées ou acquises ? Comment les définir ? Et quelle est leur importance dans le recrutement 3.0 ? Une question à laquelle L’Afnor, en partenariat avec Mazars, tente de répondre en élaborant le premier référentiel commun de soft skills. “La personnalité, est-ce une soft skill ? L’empathie, c’est une qualité ou c’est une soft skills ? Difficile de s’y retrouver dans ce terme, donc en premier lieu, il s’agit de créer un référentiel commun.”
Et le fait d’espérer à terme construire un environnement de travail d’où l’on reparte avec des compétences émotionnelles, humaines et sociales et qu’elles puissent être certifiées et transposables, est encore une utopie aujourd’hui, mais un horizon atteignable.
Les différentes générations : un vecteur de progrès pour l’entreprise
La révolution du numérique implique nécessairement une révolution du travail, non seulement dans ses applications mais aussi dans les mentalités. “La nouvelle génération post millennials n’a pas connu l’avant et l’après, et c’est à l’entreprise de s’adapter. Par exemple, chez Mazars depuis 2019 nous avons une clause autorisant le cumul d’emplois dans tous nos contrats de travail. Il y a un moment où il ne faut pas lutter. Il faut savoir écouter. Car que se passera-t-il demain si 10% des collaborateurs de l’entreprise sont indépendants ? Font-il moins partie du projet, de la mission ?”
Pour Mathilde, le futur de l’organisation du travail sera de déployer un écosystème qui crée de la valeur avec d’autres écosystèmes.
L’entreprise apprenante, le modèle du futur ?
Côté formation et transmission des compétences, pour Mathilde chacun peut apporter sa pierre à l’édifice
: “Ce ne sont pas forcément les plus experts qui sont les meilleurs formateurs. Et pourtant souvent, on veut que ce soit seulement le sachant qui forme. La capacité à vulgariser, à donner envie, à susciter l’attention, que le message soit entendu et intégré, c’est cela qui est primordial !”.
L’idée centrale est de considérer que les collaborateurs sont la première source de savoir et de connaissance de l’entreprise. “D’où l’importance liée à la formation, car les compétences dont on aura besoin demain n’existent pas encore, c’est une volonté qu’il faut déployer autour des technologies, du développement, de la data, de l’IA, mais aussi des sujets de sustainability, d’environnement social”, assure Mathilde.
Et il est moins question de trouver “la bonne formation qui valide” que de capitaliser sur l’expérience de l’acquis. Grandir professionnellement, c’est de l’expérience.
Et forcément, cela développe les compétences que l’on a en soi, plutôt que de se contraindre à rentrer dans un moule formaté. Le modèle du futur sera un monde du travail qui permettra de révéler pleinement son potentiel.